En 1944 le dollar US est « as good as gold », et les Etats-Unis possèdent plus de la moitié des réserves d’or du monde. Dans les huit décennies qui vont suivre, Washington maintiendra une continuité absolue dans sa diplomatie monétaire: le dollar n’est pas seulement « as good as gold » mais « as good as everything », tout simplement. Vous voulez du café? Il faut payer en dollar. Du pétrole? dollar. Du blé? dollar? De la bauxite, du gaz, du titane, du maïs, du jus d’orange surgelé? dollar, of course.
Or les BRICS en ont marre au dernier degré de voir échanger leurs précieuses matières premières en ce qui est essentiellement un simple bon d’achat sur l’économie US, laquelle est loin d’ailleurs de susciter une telle confiance. Les sanctions lentement accumulées sur la Fédération de Russie depuis son opposition à l’invasion illégale de l’Irak en 2003 (ou le « forget Russia » de Condoleeza Rice), accélérées depuis ses veto contre l’invasion plus illégale encore de la Syrie en 2010, puis contre son intervention en Ukraine en 2022, ont mené Moscou et Pékin à renforcer la dédollarisation du monde. Jamais, depuis 1944, l’hégémonie du billet vert n’a été aussi menacée. Il se pourrait bien que 2024 marque le début de la mort du dollar comme monnaie de réserve mondiale, et que l’ordre de Bretton Woods ne soit plus qu’un lointain souvenir en 2044.
Idriss Aberkane